Wim Delvoye, un chroniqueur au musée

L’art de Wim Delvoye est un art de la référence et de l’ornement. Et il en joue avec jubilation pour tordre nos attentes aussi bien que la matière. L’exposition proposée actuellement aux Musées royaux des Beaux-Arts de Belgique, à Bruxelles, rassemble des séries emblématiques et des nouvelles pièces dans une cohérente diversité.

Il y a quelques années, Wim Delvoye s’est amusé à hacker le logo de Walt Disney pour y glisser son nom. Au-delà de la boutade graphique, cette substitution a peut-être plus à nous révéler sur l’artiste belge qu’il n’y paraît. Non parce qu’il a fait l’acquisition d’un château en Wallonie ou qu’il doit une partie de sa renommée à un animal – dans son cas, un cochon plutôt qu’une souris. S’il est un grand artiste, le Gantois est aussi comme l’Américain, un entrepreneur et un entertainer. Delvoye l’a répété à plusieurs reprises, il ambitionne de s’adresser au plus grand nombre. Sa présence dans un grand musée national ne peut donc que le combler. L’exposition, qui rassemble des séries déjà connues et quelques œuvres créées spécialement pour l’occasion, se partage entre un espace monographique et des incursions dans les salles des maîtres anciens. La plupart de ses œuvres ont la force de l’immédiateté. On perçoit assez rapidement de quoi il s’agit, mais cela ne veut pas dire pour autant que le premier regard épuise le sujet. La torsion ou le rhabillage qu’il applique à certaines de ses sculptures ne se limite pas à la matière, elle travaille aussi le sens. Derrière son art parfois tape-à-l’œil, Delvoye est un commentateur détaché de nos obsessions et choix contemporains.
Les emblématiques cochons, mis en avant sur l’affiche, on les retrouve dans la salle des Rubens. Tabriz, Qamsar ou Yazd, leurs petits noms, font référence aux tapis iraniens qui les habillent. Glissés sous une seconde peau de soie, ils observent placidement les toiles du maître anversois. La confrontation se fait tout en douceur, comme avec ses sculptures inspirées d’un bronze de Jef Lambeaux ou de Raoul Larche qui se retrouvent un peu plus loin. Passées à la centrifugeuse, elles semblent avoir gagné en légèreté.
Tel un deus ex machina, l’artiste tord les œuvres d’art, les camions et les crucifix. La torsion qu’il fait subir à ses modèles tient presque de l’essorage, comme s’il voulait s’assurer de ce qu’il en reste. Comme au jugement dernier, on viderait le corps de tout le superflu pour peser le poids de son âme.
Dans son travail de sape de la forme et des symboles, il combine les technologies de pointe à l’artisanat le plus raffiné, passant de la modélisation 3D aux techniques de moulage à la cire perdue. Une de ses œuvres les plus fascinantes est le Goodyear Optirac, sculpture en acier qui tord la figure du pneu pour créer une double boucle sans fin, métaphore funèbre de notre obsession de la vitesse. Wim Delvoye est un artiste de l’ornement et du détail, qu’il redistribue avec ironie entre passé et présent. (…)

Dans le cadre d’un partenariat engagé avec notre consœur belge Muriel de Crayencour, fondatrice et rédactrice en chef du site d’actualité artistique belge Mu-inthecity.com, nous vous proposons de poursuivre la lecture de cet article d’un clic.

Contact

Jusqu’au 21 juillet aux Musées royaux des Beaux-Arts de Belgique, 3 rue de la Régence, 1000 Bruxelles, Belgique.

Crédits photos

Image d’ouverture : Qamsar, Tabriz, Shahreza, Arak, Karaj, Khermanshah, Bidjar & Yazd dans la salle Rubens des Musées royaux des Beaux-Arts de Belgique (2019) © Wim Delvoye, photo Dirk Pauwels – Vue d’exposition © Wim Delvoye, photo Odile Keromnes / MRBA

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