Elle illustre une belle utopie concrète cette cité d’artistes de Cachan qui accueille, au 19, allée des Arts, un hameau pas comme les autres, où plasticiens, graphistes, peintres et sculpteurs, soit près de 40 artistes se sont partagé au fil de ses vingt ans d’existence, les 22 ateliers-logements. Cette butte qui embrasse au loin Paris, en rappelle une autre, sauf qu’ici les ateliers surgissent au milieu des hêtres, pommiers, tilleuls et même d’un superbe cerisier du Japon… Ateliers de plain-pied et logements à l’étage auxquels on accède par un escalier en colimaçon qui s’envole, les bâtiments semblent juchés en parfait équilibre sur de fines échasses qui affrontent hardiment les dénivelés : du gris pour les poutrelles d’acier, du bleu pour se fondre avec le ciel et du bois en façade pour s’allier aux jardins qui gravitent autour des bâtiments. La lumière, elle se niche à l’arrière pour préserver les secrètes gestations des artistes. Enfin, et ce n’est pas une des innovations les moins anodines, les architectes ont tenu à faire tomber les barrières : nulle clôture n’enserre plantations, pelouses ou jardins potagers, les chats sont libres d’y circuler à leur aise sous l’œil avisé de la gent volatile. « La cité d’artistes, c’est le jardin de l’atelier », dit joliment un artiste de la Cité.
A l’origine de cette aventure, il faut se souvenir de l’ambitieux projet Banlieues 89 – et autant de propositions pour restaurer le lien social et transformer les périphéries urbaines (déjà) en déshérence – initié par l’architecte urbaniste Roland Castro, militant et chantre des grandes mutations pour contrer « l’apartheid urbain » comme, par exemple, déplacer les centres de pouvoir vers les banlieues et installer l’Elysée à Saint-Denis ! Deux décennies plus tard, la Cité bleue, conçue par les architectes Jean-Bernard Cremnitzer et Arno Heinz avec le soutien de la municipalité et de l’Etat, fête ses vingt ans. Pour la circonstance, Jean-Yves Le Bouillonnec, député-maire de Cachan, la municipalité et l’association de la Cité des artistes ont organisé une exposition jusqu’à la fin décembre. Une sérigraphie originale, Fragments d’art, rassemblant 22 œuvres des artistes de la Cité accompagne la publication d’un catalogue consacrant l’événement et l’avènement d’un beau projet dont on rêve qu’il inspire d’autres municipalités.
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