Ronan Barrot | Peintures

« Construire un feu de Jack London est un tout petit récit implacable. (...)En lisant ce petit récit, je me suis dit qu’un artiste au travail construit un feu lui aussi. Il faut que ça prenne, que ça prenne vite et d’un coup, sans quoi, ses membres gèlent, il s’essouffle et ne pourra espérer construire un second feu dans les débris du premier. (...) Lorsqu’on regarde les œuvres de Ronan Barrot, on a le sentiment que dans chacune de ses toiles, il a joué le tout pour le tout, qu’il entreprend, chaque fois, de figurer toute sa vérité, et non pas un pan isolé de ce qu’il doit nous dire. Chaque toile veut saisir, harponner, atteindre. Aucune ne s’abandonne à un aspect des choses, aucune ne se contente de nous en offrir un versant. Voilà qui engage une façon de peindre, de vivre et de penser. C’est sans doute ce qui donne à ces toiles leur puissance sensible. Rien n’est un prétexte. Bien sûr, il arrive que Ronan Barrot abandonne un tableau, il arrive, comme au personnage de Jack London, que le feu s’éteigne. Mais la loi de son œuvre est que le feu doit prendre, absolument, sans cesse ; avec cela, il ne sait pas tricher. On peut attendre, penser, tourner en rond, laver ses pinceaux, mais si l’on s’y remet, alors le feu doit prendre, car chaque trace que le peintre laisse sur la toile est indélébile, et elle forme avec les autres une sorte d’alliage. » Eric Vuillard. Visuel : Le nautonier, Ronan Barrot, 2007. Photo GCB / Jean-Louis Losi.