Benjamin Sabatier | Mode d’emploi

« Entre tension physique et équilibre précaire, réels ou fictifs, les œuvres de Benjamin Sabatier n’en demeurent pas moins sensuelles. Les matériaux qu’il réunit ici, le bois et le béton, se trouvent toujours dans l’obligation de lutter ou de s’associer. Le premier se situe du côté du chaud, du structuré, du naturel, du vivant alors que le second se positionne dans le froid, le liquide, l’aléatoire et le minéral. Dans ces dualités chacun possède sa rudesse et sa douceur. Le vocabulaire formel de Sabatier, par métaphore, tient également du champ lexical du chantier. Celui-ci est communément perçu comme image du monde et évoque la création artistique, traduisant une esthétique en mouvance et une dynamique plastique. (...) Le parcours emprunté par la réflexion de l’artiste est rendu visible, il révèle l’effort, l’élaboration, la mise en forme ou mise en œuvre, la réalisation, la mécanique du faire et du défaire, du construire, déconstruire et inventer. Semblable enfin à l’ambition du personnage de Bartlebooth dans La Vie mode d’emploi de Georges Perec, dont le projet se détruirait lui-même au fur et à mesure qu’il s’accomplirait, il s’agirait pour l’artiste, face à l’inextricable incohérence du monde, d’accomplir jusqu’au bout un programme, restreint sans doute, mais entier, intact, irréductible. Un manifeste en soi. » Isabelle de Maison Rouge, historienne de l’art et critique. Visuel : Sans titre, Benjamin Sabatier, 2016.